Construit par la région Nord-Pas-de-Calais, devenue Hauts-de-France, sur le site d’une ancienne fosse des mines de la ville, le musée du Louvre-Lens (Pas-de-Calais) a ouvert ses portes en décembre 2012. Géré sous la forme d’un établissement public de coopération culturelle (EPCC), il résulte de la volonté des autorités nationales et locales de décentraliser de grands musées nationaux parisiens. Il constitue l’un des symboles de la reconversion du bassin minier. Son exploitation repose sur un projet scientifique et culturel adopté en 2008 et redéfini en 2019 pour une période allant jusqu’à 2030.
Œuvre architecturale à part entière, occupant une surface de près de 30 000 m2 et situé dans un parc de 20 hectares, l’établissement mène des actions conformes à son objet : expositions, médiations, manifestations, partenariats, activités de conception et de production culturelle. Pour autant, ne disposant pas de collection propre, il ne bénéficie pas de l’appellation « musée de France ».
Si sa gouvernance fonctionne conformément à ses statuts, ces derniers, qui datent de 2010, prévoient des dispositions non conformes aux règles de droit commun qui s’appliquent aux EPCC. Ils mériteraient d’être actualisés. L’établissement devrait engager le processus de révision en ce sens. En outre, le régime d’occupation des locaux, propriété de la région, à la fois précaire, temporaire et non constitutif de droits réels, ne correspond pas à la vocation du musée, créé pour une durée indéterminée, ni à la réalité, celui-ci s’étant vu transférer des droits. Un groupe de travail a été constitué au sein des services de la région afin d’étudier les moyens de conforter la sécurité juridique de l’EPCC sur ce point. Enfin, les modalités d’exploitation de certains espaces (librairie-boutique, restaurant, cafétéria), devraient être revues, notamment sur la question des redevances ; le musée a passé, en février 2021, un marché d’assistance juridique en vue de la relance des contrats.
L’établissement, qui a réorganisé ses services en 2018, s’appuie sur de nombreux outils de gestion.
Si sa situation financière est comptablement équilibrée en 2019, avec une capacité d’autofinancement de 0,26 M€ et un fonds de roulement de 2,2 M€, son modèle économique ne l’est pas. En effet, son budget annuel (14,9 M€) repose à 84 % sur les contributions financières des collectivités territoriales (12,5 M€). Il ne dégage que 16 % de ressources propres alors qu’il s’était vu assigner, à l’origine, un objectif de 20 %. De plus, ses charges de personnel, qui atteignent près de 5 M€ en 2019, ont progressé de 15 % en quatre ans. Dans le contexte de la crise sanitaire, le Louvre-Lens a fermé ses portes durant près de cinq mois en 20201. Il a adapté ses pratiques de travail et de communication afin de garder le lien avec les publics. Néanmoins, la crise a renforcé le particularisme de son modèle financier. Ainsi, ses pertes de recettes propres ont largement été couvertes par les économies générées par la fermeture et, surtout, par le maintien de l’intégralité de ses financements publics, si bien que son épargne s’en est trouvée accrue (1,33 M€, fin 2020) de même que son fonds de roulement (2,9 M€). En 2020, son fonctionnement a été assuré à près de 90 % par les collectivités. Le
musée ne peut être qu’encouragé à s’engager, dès 2021, dans une démarche prospective visant à rééquilibrer la répartition de ses ressources et contenir ses dépenses, en particulier s’il souhaite mener à bien son projet de rénovation de la Galerie du Temps.
Depuis son ouverture en 2012, le Louvre-Lens a accueilli plus de 4,3 millions de personnes. Bien que n’atteignant pas la cible initiale des 550 000 visiteurs par an, sa fréquentation n’a cessé de croître depuis 2016 et dépassé les 530 000 en 2019 grâce, en particulier, au succès des expositions temporaires et des activités culturelles. La crise de 2020 a, cependant, infléchi cette progression, avec une chute de fréquentation de 59 % par rapport à 2019.
Avec 70 % du public originaire de la région, dont 20 % de scolaires, le musée remplit ses objectifs d’appropriation du lieu par les habitants et de démocratisation culturelle. En revanche, il n’attire que peu de visiteurs étrangers et provenant d’autres régions. Ses retombées économiques sur le territoire, évaluables globalement à 191 M€ depuis son ouverture, ne se situent pas encore à la hauteur de l’importance des fonds publics mobilisés par les collectivités (229 M€). Pour autant, il contribue au rayonnement du territoire ainsi qu’à sa transformation.
Dans le cadre de son nouveau projet scientifique et culturel, il conviendrait que le Louvre-Lens se fixe des objectifs précis de résultat afin de pouvoir évaluer, chaque année, leur réalisation. L’établissement a engagé une démarche en ce sens.
Recommandations
Rappel au droit n° 1 : mettre en conformité les statuts avec les dispositions du code général des collectivités territoriales applicables aux établissements publics de coopération culturelle (articles L. 1431-1 et suivants et R. 1431-1 et suivants dudit code).
Rappel au droit n° 2 : procéder au transfert comptable des biens mobiliers de la région dans le patrimoine de l’établissement afin de permettre leurs amortissements, conformément aux articles L. 2321-2 et R. 2321-1 du code général des collectivités territoriales.
Recommandation n° 1 : développer une dimension prospective dans le rapport annuel sur les orientations budgétaires en présentant, notamment, les engagements pluriannuels envisagés en fonctionnement et en investissement.
Recommandation n° 2 : renforcer les actions visant à générer un niveau de ressources propres tendant vers 20 % des produits, conformément aux orientations fixées lors de la création du musée.
Recommandation n° 3 : dans le cadre du projet scientifique et culturel 2019-2030, fixer des objectifs annuels quantitatifs et qualitatifs, avec des indicateurs de résultat, permettant d’apprécier leur atteinte et de mesurer la satisfaction des visiteurs.